Le « carrefour des APAC » est un espace d’échange et de rencontres entre les communautés APAC de différentes régions du Maroc et d’autres parties du monde. Cette série de Webinaires a été organisée par les ONG membres du CAM, en collaboration avec le Programme de Micro-financements du FEM Maroc et le réseau régional Afrique du Consortium APAC
First published on 11/17/2021, and last updated on 09/21/2023
Le « carrefour des APAC » est un espace d’échange et de rencontres entre les communautés APAC de différentes régions du Maroc et d’autres parties du monde. Cette série de Webinaires a été organisée par les ONG membres du CAM, en collaboration avec le Programme de Micro-financements du FEM Maroc et le réseau régional Afrique du Consortium APAC
Avant-Propos
Le « Carrefour des APAC » a été conçu dans le prolongement des fêtes agraires ou moussem, qui sont des rassemblements festifs consacrés aux arts et aux traditions populaires du Maroc. Dans les sociétés traditionnelles rurales, ces fêtes populaires égrènent les saisons, célébrant les ressources locales, la fin des récoltes, l’ouverture des alpages d’estive (agdals en langue amazighe), les mariages, des personnages religieux éminents, etc., rappelant aux hommes les liens qui les unissent entre eux et les liens qui les unissent à la nature. Du nord au sud du Maroc, les moussems se succèdent (petites villes de tentes, espaces de rencontres et d’échanges, etc.), comme autant de manifestations pour s’imprégner de la culture locale et des traditions des communautés qui les perpétuent.
D’un autre côté, pour célébrer annuellement « les Territoires de Vie », il ne pouvait y avoir meilleure occasion que la Journée Mondiale de la Biodiversité. Les Membres du Consortium APAC Maroc ont donc pris la décision de proclamer le mois de mai comme date de commémoration annuelle des APAC.
Le « carrefour des APAC » se présente dès lors comme un espace d’échange et de rencontres entre les communautés APAC de différentes régions du Maroc et d’autres parties du monde, mais aussi comme un espace réunissant les réseaux régionaux du Consortium APAC, des experts de différentes disciplines, des alliés des APAC et autres, pour exposer, dévoiler et rappeler qu’elles apportent des contributions significatives à la conservation, qu’elles constituent un élément crucial du réseau mondial de conservation et « font donc partie de la solution ».
Les Membres du Consortium APAC Maroc étaient heureux d’accueillir à leur côté les Coordinateurs Régionaux et Membres du Consortium APAC international. Car seul, il est possible d’avancer, mais ensemble, on peut aller plus loin.
Les organisateurs souhaitent également remercier vivement le PMF/FEM Maroc et l’ensemble des partenaires de l’initiative mondial de soutien pour leur solide appui à la promotion des APAC à travers le monde.
Lundi 31 mai 2021
Séance d’ouverture du Carrefour
Le lancement du Webinaire a été assuré par les principaux partenaires du CAM, le PMF/FEM et le Consortium APAC Réseau Afrique, ainsi que par l’ONG catalytique du programme au Maroc, l’AESVT.
Dans son allocution d’ouverture, Mme Badia Sahmia, Coordinatrice Nationale du SGP Maroc, a rappelé le cadre global dans lequel s’inscrit le soutien du programme au processus APAC, à savoir l’initiative mondiale de soutien (Global Support Initiative)[1]. Elle a également donné un bref aperçu de l’approche et des étapes parcourues au Maroc pour la promotion des APAC, des moments forts du processus, des publications (réalité nationale et revue légale), et des projets soutenus dans ce cadre (11 projets pour un montant de 400 000 $, et de nouveaux projets en cours d’approbation pour un montant de 300 000 $). Enfin, elle a souligné l’effort et le travail fourni en amont par l’ensemble des ONG membres du CAM, aussi bien au niveau local que national, qui a permis des avancées significatives en matière d’identification et de promotion des APAC comme acteur incontournable en matière de conservation du patrimoine naturel national. Mr Abderrahim Ksiri, représentant de l’ONG catalytique AESVT et membre du CAM, a pour sa part mis l’accent, dans son intervention, sur l’importance de la préservation de la biodiversité pour le Maroc, reconnu comme faisant partie du hotspot de biodiversité au niveau méditerranéen. Il a également souligné que le CAM nouvellement créé est prometteur et que sa force réside dans l’harmonie qui existe entre ces membres.
Le Consortium APAC a publié un nouveau rapport le 20 mai 2021 qui estime que les peuples autochtones et les communautés locales conservent activement plus de 20 % des terres de la planète et plus de 20 % des zones clés pour la biodiversité.
Millet farmer in India. Photo: Ashish Kothari
Mr Christian Chatelain, Coordinateur en Afrique pour le Consortium APAC, a donné un aperçu de ce que sont les APAC (ou Territoires de Vie, terme privilégié car évoquant aussi le côté humain et culturel), de leur importance pour la conservation et des progrès accomplis par le Consortium APAC. Il a notamment souligné qu’au moins 50 % des terres seraient gérées collectivement par des communautés locales et autochtones, précisant qu’il existe de plus en plus de publications sur la quantité de terre dans le monde qui est effectivement gouvernée et gérée par les peuples autochtones et les communautés locales, même sans reconnaissance légale ou sécurité d’occupation, et sur leur contribution à la diversification et à la conservation de la nature.
[1] Cette initiative multipartenariale impliquant aussi bien le Secrétariat de la Convention sur la Diversité Biologique, le Consortium APAC et le Programme Mondial sur les Aires Protégées de l’UICN, et le Centre de Surveillance pour la Conservation du Programme des Nations Unies pour l’Environnement, poursuit l’objectif central d’amélioration de la reconnaissance, du soutien et de l’efficacité globale des APAC pour la conservation de la biodiversité.
Panel 1 : Dynamique de réseaux APAC
Panel 1 : Dynamique de réseaux APAC
Le premier panel a porté sur les différentes dynamiques de réseaux APAC et leurs évolutions dans divers pays, en particulier pour ce qui concerne leur genèse, cadre légal de reconnaissance, prise en compte de la dimension « genre », mise en place de l’examen par les pairs et perspectives.
Ce panel a été présidé par Mr Lahcen Kabiri/ Coordinateur du CAM pour les APAC Oasiennes.
Intervenants
- Christian Chatelain – Réseau Afrique
- Sergio Couto -Réseau Europe
- Najwa Es-siari – Maroc
- Albert Maurilio Chan Dzul – Mexique
- Alexis Kaboré – Burkina Faso
Christian Chatelain a également centralisé sa présentation sur la situation des APAC et la genèse de leurs réseaux en Afrique, expliquant que la mise en réseaux au niveau régional a été accélérée par la volonté de décentralisation du Consortium APAC international. La carte ci-dessous donne un aperçu de la répartition des réseaux régionaux en Afrique.
En matière de reconnaissance nationale des APAC sur le plan légal, Christian Chatelain a précisé que cet aspect est d’une grande importance pour que les APAC puissent se défendre elles-mêmes. Il a cité quelques-uns des cas les plus avancés, comme celui du Sénégal où la première reconnaissance légale a été obtenue en 2010 par l’APAC de Kawawana (une APAC emblématique nationale) et qui est en recherche d’une loi spécifique APAC ; celui de la République Démocratique du Congo, qui a intégré les « Territoires de Vie » dans la Loi sur les Peuples Autochtones (mars 2021) ; ou encore le cas de Madagascar, où un certain nombre de lois sont en faveur des APAC telles la Loi Gelose (transfert de gestion aux communautés), la Loi sur les Fokonolona (qui serait en cours de mise à jour pour être convertie en une loi « APAC »), et la nouvelle loi foncière (domaine collectif).
En ce qui concerne les examens par les pairs, les pays qui ont pu mettre le protocole en place sont l’Espagne, L’Iran et les Philippines. Très peu de pays seraient avancés sur ce point en Afrique. Là aussi, l’exemple de Kawawana a été cité : la particularité a été de la mise en place, par l’ONG catalytique Kabeka, d’un filtre de qualité au départ, puisque c’était la seule APAC identifiée à l’époque.
Enfin, Christian Chatelain a terminé sa présentation en proposant que le Maroc puisse tenir la place de leadership en Afrique du Nord puisqu’il n’existe pas encore de réseau régional dans cette zone de l’Afrique. Ce point a été retenu comme une recommandation à étudier par le CAM.
Sergio Couto, Coordinateur Régional pour l’Europe, a par la suite apporté des éclairages sur la naissance du réseau espagnol, des terres communales et des APAC. La consolidation de ce travail se serait faite par étapes : i) la mise en réseau de communautés afin que celles-ci ne se sentent plus isolées, ii) la création d’une association et d’un groupe de travail afin de pouvoir élargir le réseau au niveau national.
Najwa Es-siari, Coordinatrice Nationale du processus APAC au Maroc, a donné un aperçu de l’émergence, à partir de 2016, de la plateforme d’action en faveur des APAC et de la préservation de la diversité bioculturelle au Maroc. Parmi les réalisations importantes depuis cette date : i) l’exercice d’élaboration de la Réalité Nationale – qui constitue aujourd’hui un premier référentiel national à compléter au fur et à mesure de l’identification de nouvelles APAC-, ii) celui de la revue légale qui a conclu que la mise à l’agenda d’une reconnaissance juridique des APAC ne serait pas envisageable dans le court terme et qu’il faut plaider dans un premier temps pour qu’il en soit fait mention dans les textes de lois pertinents sur l’environnement, iii) l’identification de plus d’une trentaine d’APAC potentielles et la documentation de plus d’une dizaine d’APAC, iv) l’enregistrement des premières APAC ; l’Oasis de Tighfert, la zone clé pour la biodiversité Imegdale et l’APAC Agdal Igourdane. Les ONG membres du CAM ont par ailleurs également développé et testé sur le terrain : de solides méthodologies telles la triple approche recherche scientifique – restauration des écosystèmes – soutien aux moyens de vie durable, dans le cadre d’une démarche systémique de préservation des paysages culturels /cas du Haut Atlas (Global Diversity Foundation/MBLA) ; des outils innovants de revitalisation et d’adaptation des institutions coutumières de gouvernance et des règles de gestion associées pour intégrer les femmes et les jeunes (l’exemple le plus spectaculaire dans ce sens étant la réécriture à partir d’anciens parchemins de chartes de gestion des ressources hydriques, pastorales, gestion de la vie quotidienne, voir Migration & Développement) ; la gestion des greniers collectifs, etc. ; des démarches innovantes en matière de gestion durable des ressources hydriques et de préservation des écosystèmes Oasien (AOFEP) ; et enfin la mise en place des aires marines protégées et des no take zones (AGIR).
Il en est ressorti de ce premier panel l’importance de travailler avec les communautés sans se substituer à elles ; la nécessité de les renforcer pour qu’elles puissent plaider seules ; la nécessité d’un développement des compétences au sein des APAC.
Albert Maurilio Chan Dzul, Coordinateur pour la Mésoamérique et basé au Mexique, a apporté un témoignage sur la dynamique de réseautage des APAC au Mexique, notamment en parlant des jeunes autochtones qui se mobilisent pour leurs terres de vie.
Alexis Kaboré, Coordinateur Régional pour le Sahel, est intervenu pour discuter des forces et défis du réseau national APAC au Burkina Faso, notamment de l’expérience de l’Association Nationale des APAC du Burkina Faso. Il a souligné le fait que la biodiversité au Burkina Faso était très menacée par les nombreux chantiers et activités minières. Il a fallu deux années de cheminement afin de réussir à formaliser le réseau APAC, qui aujourd’hui est dynamique et vise réellement la reconnaissance et l’autonomisation des APAC.
Christian Chatelain a donné un autre exemple, celui de l’expansion des APAC au Sénégal précisant que l’ambition derrière la création du réseau national était d’identifier un plus grand nombre d’APAC à travers le pays, de les renforcer en capacité, et d’intégrer un réseau régional plus large. Et de préciser que pour l’Afrique de l’Ouest, il y aurait deux réseaux : un réseau d’APAC marines et côtières (Sénégal, Gambie, Guinée, Guinée Bissau,…) avec son propre coordinateur et un réseau d’APAC sahéliennes (Burkina, Niger, Mali, Tchad,…) avec son coordinateur.
Panel 2 : Témoignages apac résilientes. Les APAC Marines
Mardi 1er juin
Panel 2 : Témoignages apac résilientes.
Les APAC Marines
Ce deuxième jour de Webinaire a débuté avec des allocutions d’ouverture, suivi du résumé du Webinaire de la veille. Najwa Essiari a souligné le fait que les discussions de la veille étaient des pistes pour de futures collaborations Sud-Sud ou Nord-Sud afin de tester et d’adapter différents outils proposés par le Consortium international.
Présidé par Mr Jalal El Moâta/membre du comité national de pilotage du PMF/FEM Maroc.
Cas de l’aire marine protégée d’Al Hoceima/Maroc.
Les APAC marines ont pu rejoindre cette année le carrefour des APAC du Maroc. Leur célébration vérifie de la même manière les prolongements des fêtes agraires. Le Festival de la Sardine au Parc National d’Al Hoceima au nord du Royaume et celui de la localité d’Aglou à Souss Massa sont uniques au Maroc. On parle ici de moussem marins : des rassemblements festifs consacrés aux arts et aux traditions populaires des communautés de pêcheurs/agriculteurs. Ces moussems ont par ailleurs été introduits dans les programmes du festival international SlowFood/ici SlowFish.
Il convient de signaler par ailleurs que les APAC marines du Maroc ont été reconnues par l’UICN comme des cas rares de solutions fondées sur la nature en Méditerranée.
Lhoucine Nibani, Président de l’Association AGIR, a été invité pour partager cette expérience dans le cadre du carrefour. Il a mis en exergue à travers sa présentation la nécessité « d’agir localement et de voir globalement ».
AGIR, en se joignant au Consortium APAC Maroc, va constituer un acteur crucial, en apportant son expérience dans l’appui à des solutions significatives pour relever des défis sociétaux de taille, et procurant des avantages nets pour la biodiversité et l’intégrité des écosystèmes côtiers et marins du pays tout en assurant leur viabilité économique. Il est de même crucial de mettre en évidence les avantages de renforcer la gouvernance des APAC marines en terme d’inclusion, de transparence et d’autonomisation pérenne via la mise en valeur de la dimension bio-culturelle et la spécificité des communautés de pêcheurs traditionnels.
Maryem Zguaid a ensuite donné un aperçu du programme ARCOL de l’Association AGIR. Ce programme focalise sur le travail des coopératives de femmes qui exercent l’activité de myciculture, ainsi que sur le développement de l’économie circulaire. Le programme a également permis de dégager des arguments forts en faveur des APAC marines.
Lhoucine Nibani s’est réjoui de l’effort national mis en place jusque-là qui permettra à très court terme le déploiement d’une vision intégrale partagée par les différents acteurs et à même d’améliorer la résilience des APAC côtières et marines du pays. Le constat et postulat de départ est que l’homme fait partie intégrante de la nature, et on ne peut aborder l’un sans l’autre. Et de conclure que les APAC ont aujourd’hui plus que jamais besoin d’un encadrement de proximité, d’accompagnement (pas qu’on se substitue à elles pour décider des solutions), d’un support et d’une implication effective des institutions publiques, pour des AP communautaires durables.
Cas de l’APAC de Kawawana.
La parole a ensuite été donnée à Salatou Sambou, Coordinateur Régional pour l’Afrique de l’Ouest, qui a présenté « l’APAC de Kawawana en Casamance au Sénégal – une aire côtière et maritime entièrement gouvernée, gérée et conservée par une initiative locale ». Il a parlé du succès de cette APAC qui attire maintenant certaines menaces, comme par exemple la venue de nombreux pêcheurs extérieurs, attirés par l’abondance de biodiversité, restaurée grâce à l’APAC. Cette APAC a connu une forte mobilisation des pêcheurs qui a conduit à la reconnaissance de l’APAC au niveau local comme zone conservée et gérée par la communauté. Depuis, d’autres APAC ont vu le jour au Sénégal et aujourd’hui les réseaux zonaux recherchent une nouvelle reconnaissance à travers une loi sur les APAC.
Histoire de Kawawana. La communauté rurale de Mangagoulack, dans la région de Casamance, au Sénégal, est une zone relativement isolée, habitée presque exclusivement par des personnes djola. Si elle est toujours en marge du «développement» (en 2009, il y manquait une route goudronnée et de nombreux foyers n’avaient pas encore l’électricité), elle est par contre vibrante par la richesse de sa culture locale. Les Djola s’investissent beaucoup dans les liens familiaux et communautaires. C’est une société égalitaire et profondément démocratique (ils n’ont pas de «chef», les décisions sont prises par les assemblées villageoises et les femmes sont respectées et puissantes). Les gens adhèrent à une religion ou une autre, comme l’islam ou le christianisme, mais tout le monde maintient les cérémonies et pratiques traditionnelles (par ex. les rites de passage communaux, la collaboration dans le travail agricole, l’attachement aux produits locaux) et respectent les fétiches omniprésents qui sont les symboles d’une perception sophistiquée des liens entre les mondes visibles et invisibles. Dans l’ensemble, la solidarité communautaire et ethnique se trouve être exceptionnellement dynamique et puissante.
Panel 3 : Témoignages APAC Résilientes. Les APAC Oasiennes et des milieux désertiques.
Mercredi 2 juin 2021
Panel 3 : Témoignages APAC Résilientes
Les APAC Oasiennes et des milieux désertiques.
Ce troisième jour de Webinaire a commencé avec des allocutions d’introduction et le résumé de la veille. Ce troisième Webinaire a été consacré aux écosystèmes oasiens. Najwa Essiari a exprimé le fait que les points négatifs des oasis sont souvent évoqués, contrairement aux atouts qui ne sont pas toujours connus.
Cas de l’APAC de Tighfert. Étude de cas publiée sur le site de Protected Planet.
Lahcen Kabiri a présenté l’APAC Tighfert qui a une relation avec les oasis et les montagnes et qui occupe une position géographique très importante et très diversifiée.
Les oasis subissent beaucoup de menaces externes comme internes, telles que des conflits entre la population, ou la migration des jeunes oasiens. La question de la durabilité est très importante dans les oasis : en effet ce sont des écosystèmes très fragiles que les communautés locales doivent valoriser.
Une discussion autour de ce thème s’en est suivie : les oasis sont une forme de résilience et de récupération des terres dégradées. L’avenir est dans les lieux désertiques, lieux d’opportunités.
Aziz Hlaoua, anthropologue et sociologue, a ensuite présenté son travail sur les questions culturelles, notamment du patrimoine oral, liées aux oasis au Maroc.
Said Karimi, professeur chercheur, a présenté son travail sur L’art melhoun : icônes des oasis. Le melhoun est une poésie arabe au sens très profond originaire des oasis.
Lors des discussions qui ont suivi, Ahmed Chbab a rappelé la relation triangulaire qui existe entre la culture, la biodiversité et la géo-diversité, puisque ce sont trois notions qui partagent le lien avec la vie, les paysages, les montagnes et tous les aspects de la culture. L’oasis est une bibliothèque qu’il faut lire et non délaisser.
Essiari a évoqué, en guise de conclusion, la richesse et la diversité du Maroc, qui prouvent la nécessité du travail à faire pour parvenir à préserver les différents écosystèmes.
Panel 4 : Témoignages APAC Résilientes. Les APAC des zones de montagnes et forêts
Jeudi 3 juin 2021
Panel 4 : Témoignages APAC Résilientes
Les APAC des zones de montagnes et forêts
Présidé par Aziz Rahou. Membre du comité de pilotage du PMF/FEM
Ce Webinaire a débuté avec la présentation de Joseph Itongwa, Coordinateur Régional pour l’Afrique Centrale, qui a apporté un témoignage à travers l’étude de cas des APAC forestières au nom de l’Alliance Nationale d’Appui et des promotions des Aires du Patrimoine Autochtone et Communautaire en République Démocratique du Congo. Il a notamment souligné l’importance de la documentation et de la mise en place des réseaux, dont la réussite repose sur une stratégie opérationnelle claire devant comporter trois principaux axes : le renforcement des APAC, le travail de la sécurisation légale et le réseautage. Le réseau de la RDC est aujourd’hui un partenaire de choix du Ministère de la Biodiversité. Cela représente une grande opportunité pour les communautés APAC, en faveur de leur sécurisation et de la protection de tout leur territoire par le droit du foncier, même en l’absence d’une reconnaissance claire des APAC. Une voie s’ouvre en République Démocratique du Congo, car l’Assemblée Nationale a adopté des lois et des dispositions sur la reconnaissance des droits des peuples autochtones. Cependant les APAC connaissent beaucoup de menaces géopolitiques (groupes armés) mais aussi environnementales (coulées de lave).
Pablo Dominguez, éco-anthropologue des communs et Membre du Consortium APAC international, a présenté son travail sur les communs et les APAC pastorales des montagnes et de la Méditerranée. À travers une présentation introductive sur les agdals, il a montré l’existence d’une forte corrélation entre la faible richesse spécifique et couverture végétale dans les alpages en méditerranée, la stabulation des troupeaux qui signifie aussi la réduction des « communs » et espaces collectifs, et l’absence de gestion et de gouvernance communautaire.
Aziz Rahhou a précisé qu’au Maroc, il y a eu une réelle évolution en matière de gestion des territoires pastoraux ces dernières années. Le cadre du Consortium APAC permettra davantage de plaider en faveur du maintien de ces pratiques ancestrales qui ont fait leur preuve en matière de préservation de la biodiversité.
Soufiane M’Sou, jeune chercheur et coordinateur de projets pour l’Association marocaine pour la biodiversité et les moyens de subsistance (MBLA) et la Global Diversity Foundation (GDF), et Membre du Consortium APAC Maroc (CAM), a ensuite présenté l’étude de cas des APAC pastorales au Maroc à travers le cas de l’Agdal Igourdane, territoire considéré comme un des principaux foyers de la biodiversité dans le Haut Atlas Central. Dans cette région, l’espace et l’institution de l’Agdal sont bien respectés, ce qui permet la reconstitution du milieu (suivi écologique assuré par MBLA/GDF) et assure la durabilité de l’écosystème. Le plan de gestion de l’Agdal est en cours d’élaboration dans le cadre d’un processus hautement participatif, mettant l’accent sur la mobilisation des jeunes et la préparation de la relève (sensibilisation et formation).
La parole a ensuite été donnée à Rania Khalil, coordinatrice en agriculture et manager en éducation sur les Hima au Liban. Cette présentation a mis en exergue l’importance de la valorisation des « territoires de vie » et leur promotion comme espaces pédagogiques, servant à éduquer les jeunes générations et futurs gestionnaires et décideurs sur les modes de vie et pratiques ancestrales et leurs bénéfices en termes de conservation.
Mohamed Baghadi, de l’Association Migration & Développement et Membre du CAM, a proposé un exposé sur le projet de revitalisation des pratiques ancestrales de gestion des ressources naturelles dans le massif de Siroua, dans l’Anti-Atlas marocain. Un des aspects important du travail de M&D, qui peut inspirer d’autres Territoires de Vie, a été la réécriture des chartes communautaires anciennes (écrites sur bois ou sur de la peau de chèvre), mais dont le contenu (règles coutumières de gestion Azerf en langue amazighe) est transmis plutôt de manière orale.
Vendredi 4 juin 2021
Lecture des recommandations
Recommandations générales
- Adopter l’appellation « Territoire de Vie » ;
- Perpétuer cette tradition et organiser le carrefour en version webinaire chaque année dans le sillon de la célébration de la Journée Internationale sur la Biodiversité ;
- Organiser des carrefour/moussem des APAC nationales de manière tournante (Oasis, Montagne, Aires Marines,….).
Niveau communautaire
- Poursuivre le soutien aux communautés pour renforcer leur sécurité et résilience en développant des initiatives transversales et des projets concrets qui peuvent porter sur les moyens de subsistance, mais aussi sur des aspects comme les droits au foncier, etc. ;
- Mettre en réseau les communautés pour constituer une masse critique et une force de plaidoyer. Démultiplier les rencontres entre communautés APAC.
- Créer des réseaux régionaux et une sorte de fédération des réseaux régionaux ;
- Poursuivre le travail d’identification des communautés APAC ;
- Informer, sensibiliser et plaider en faveur des droits collectifs, du droit des communautés locales à gérer et disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources, engager aussi une réflexion sérieuse sur le PSE et sur les mécanismes APA. Les droits collectifs regroupent les droits qui ne concernent plus directement l’individu mais qui visent à préserver l’intégrité des communautés dans son ensemble. Ces droits concernent les ressources naturelles, la prise de décision par rapport aux orientations en matière de développement, le respect du patrimoine commun, des groupes vulnérables, etc. Identifier et exploiter ce qui existe au niveau de la législation et qui est à caractère contraignant.
Niveau national
- Renforcer les réseaux de jeunes en faveur des APAC à l’image du réseau des jeunes des Territoires de Vie. Ce réseau de jeunes devra voyager au niveau du pays pour promouvoir et plaider en faveur des APAC (caravane des jeunes des Territoires de Vie marocains) ;
- Créer des groupes de travail ou commission thématiques : (prévu pour la structuration du Consortium Maroc. Parmi ces commissions : la Commission scientifique ; établir des partenariats avec des institutions scientifiques. Baser l’argumentation, pour établir le nexus pratiques traditionnelles de gestion des ressources naturelles et des territoires et préservation de la biodiversité (spécifique et écosystémique), sur des données scientifiques fiables ; mettre en place ou constituer des équipes/un réseau de chercheurs au niveau régional et national sur les questions en lien avec les APAC ; pour alimenter le rapport national sur les APAC à produire tous les deux ans (en même temps que le rapport national sur la biodiversité) ; développer un projet pour appuyer la documentation de nouvelles APAC et proposer un rapport tous les deux ans sur les APAC nationales (contribution à la préservation de la biodiversité, superficies protégées) à présenter au point focal biodiversité et au point focal CC , l’institution en charge des AP ;
- Commission sur les aspects juridiques. Les APAC dans la législation nationale: créer une équipe composée de juristes nationaux chevronnés pour une lecture des lois au regard de leur prise en compte des questions liées à l’intégrité, à la sécurité (droits foncier), à la reconnaissance des APAC pour le respect des institutions et des règles coutumières de gestion ; ne pas rester timides dans nos propositions , mais aller dans le sens d’une loi (décret) spécifique sur les APAC ; plaider aussi pour l’intégration des APAC dans le réseau des aires protégées.
Niveau régional – Afrique, Maghreb, Méditerranée, pays arabes (oasis)
- Renforcer la coopération Sud-Sud et Nord-Sud, démultiplier les rencontre avec les réseaux régionaux à ces différents niveaux, à travers le SGP (développer une initiative pour aller dans le sens d’un Consortium Maghrébin des APAC), et développement d’initiatives conjointes inter-pays ;
- Organisation de webinaires thématiques pour l’harmonisation des approches et des outils: i) examen par les pairs, ii) évaluation de la sécurité et de la résilience ; iii) processus de renforcement autonome, etc. ;
- Mais aussi des webinaires pour suivre les avancées au niveau de chaque pays et démarches pour la reconnaissance au niveau législatif et prise en compte dans les politiques.
Les organisateurs
Cette série de Webinaires a été organisée par les ONG membres du CAM,
en collaboration avec le Programme de Micro-financements du FEM Maroc
et le réseau régional Afrique du Consortium APAC.