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Expériences communautaires avec le COVID-19 en Afrique francophone

Dans plusieurs pays d'Afrique, les Peuples Autochtones et les communautés locales ont été davantage touchées par les mesures gouvernementales strictes que par le virus lui-même

ICCA Consortium Members in several French-speaking countries in Africa have taken measures to help limit the spread of the virus among Indigenous Peoples and local communities. Photo: REGUIZOH

First published on 06/30/2021, and last updated on 09/21/2023

Bien que de moindre audience, l’Afrique n’a pas été épargnée par la pandémie de COVID 19 depuis le début de l’année 2020. Certains pays comme le Sénégal ont été moins atteints que d’autres, mais tous les gouvernements africains ont mis en place des mesures barrières et des limites de libertés pour freiner la diffusion du virus sur leurs territoires.

Les Peuples Autochtones et les communautés locales qui vivent partout en Afrique ont, eux-mêmes, suivi les consignes de leurs gouvernements, au moins au début de la pandémie, et ils sont aujourd’hui confrontés aux mêmes évolutions que dans tous les pays du monde, à savoir l’apparition de variants et le développement de plusieurs vaccins, pour certains controversés. Le point commun à tous les pays d’Afrique est que les mesures barrières n’ont pas du tout été favorables aux Peuples Autochtones et aux communautés locales, comme les restrictions de mouvement et les distanciations sociales qui ont affecté leurs valeurs traditionnelles.

Grâce au soutien de Swedbio et d’autres donneurs, les Membres du Consortium APAC de plusieurs pays d’Afrique francophone ont pris des mesures pour contribuer à limiter la propagation du virus parmi les Peuples Autochtones et les communautés locales.

Pour l’Afrique, les fonds de SwedBio ont soutenu des activités au niveau national telles que des ateliers et des dépenses opérationnelles de nos Membres et des réseaux nationaux dans six pays (Bénin, Burkina Faso, RDCongo, Guinée, Madagascar et Sénégal). Dans certains cas, ces activités étaient liées au processus post-2020 de la Convention sur la diversité biologique et dans d’autres cas, il s’agissait de consultations, d’informations à la base ou d’ateliers sur les réponses communautaires à la pandémie COVID-19.

Au Sénégal, le coordonnateur du Consortium APAC et l’association KaBeKa ont, entre autres, acheté et distribué du matériel sanitaire et effectué des sensibilisations diverses. Au Bénin, GRABE-BENIN et AMAF-Bénin ont tenu plusieurs ateliers de sensibilisation COVID-19 pour une dizaine de communautés locales avec information, formation aux gestes barrière, distribution de matériel et réflexions sur la « Gouvernance des APAC dans le contexte de la pandémie COVID-19 ». Au Burkina Faso, l’ASAPAC-BF et NATUDEV ont profité de plusieurs réunions de travail pour rappeler les mesures barrières et distribuer des protections et produits hydroalcooliques. De même en RDC, où l’ANAPAC-RDC a utilisé plusieurs ateliers techniques relatifs au plaidoyer sur l’adoption de la loi de protection des Droits des Peuples Autochtones et le processus de la CDB et son Cadre mondial post 2020, pour mener des actions de sensibilisation COVID-19. En Guinée, le Consortium national APAC et REGUIZOH ont organisé un atelier spécifique concernant les impacts de la COVID-19 sur les APAC.

Si les mesures prises par les gouvernements ont certainement été nécessaires pour les nations et surtout leurs centres urbains, au niveau des communautés rurales, c’est plus l’impact socio-économique qui a été ressenti que les effets de la pandémie elle-même, surtout en termes de nombre de morts. Par exemple, le Sénégal rapporte que les mesures de l’état, notamment le couvre-feu, a d’une part bloqué la seule source de vie de nombreux pécheurs de plusieurs APAC—territoires de vie (leur pêche se pratiquant habituellement essentiellement la nuit) et a favorisé la pêche illicite par la limitation des possibilités de surveillance. Par ailleurs, certaines communautés comme celles du Burkina Faso ressentent plus d’inconfort de vie à cause de l’insécurité dû au terrorisme qu’à cause du virus. Cela ne les a pas empêché d’activer leurs systèmes traditionnels de gestion des agressions extérieures, notamment la pratique des sacrifices dans des bois ou mares sacrés, ainsi que la pharmacopée traditionnelle de prévention. Les pays du Sud n’ayant pas les capacités de compensation des pertes économiques comme dans le Nord, aux mesures de l’état se sont substituées plusieurs activités informelles et à risque (marchés spontanés, enterrements cachés pour être en famille, etc.) mais la solidarité entre personnes et entre familles est restée cependant la réponse principale des communautés à la pandémie.

Il existe en Afrique comme dans le monde entier de nombreuses expériences sur la résilience, l’autonomie, l’autosuffisance et la solidarité des Peuples Autochtones et des communautés locales, porteuses de leçons et de sagesse cruciales non seulement pour faire face à la pandémie actuelle mais aussi pour mettre l’humanité sur la voie de la guérison avec sa Terre Mère. D’une manière générale, les communautés ont eu recours à leurs lois et pratiques coutumières pour répondre à la pandémie dans leur contexte local de manière beaucoup plus efficace que les gouvernements des États, ce qui souligne l’importance de la décentralisation, de la relocalisation et de la dévolution du pouvoir de décision à ceux qui vivent les réalités in situ. Espérons que l’expérience acquise avec cette pandémie permettra aux Peuples Autochtones et aux communautés locales de mieux répondre aux autres menaces extérieures, notamment le changement climatique, dont l’impact sur la planète et ses habitants sera encore plus important que celui de COVID-19.