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De nouveaux rapports indiquent comment soutenir les défenseurs des droits humains et environnementaux ainsi que les militants pour le climat, menacés alors qu’ils luttent pour une planète saine pour tous

Depuis déjà longtemps, les défenseurs des droits humains et environnementaux et les militants pour le climat, y compris des Peuples Autochtones et des communautés locales, font part des difficultés qu’ils rencontrent avec les organisations qui leur offrent soutien et protection contre les menaces. De nouveaux rapports analysent les lacunes dans la communication entre les défenseurs, les bailleurs et les organisations de soutien, et présentent des recommandations sur la meilleure façon de les combler

Des défenseurs de la tribu Sioux de Standing Rock et des milliers de manifestants participent à une manifestation contre le projet d’oléoduc Dakota Access Pipeline à Los Angeles (États-Unis), le 10 décembre 2016. Photo : Aydin Palabiyikoglu/Agence Anadolu/Getty Images

First published on 07/01/2022, and last updated on 09/21/2023

Par Milka Chepkorir (Coordinatrice du Consortium APAC, Défendre les Territoires de Vie) et Eva Maria Okoth (Natural Justice, Membre du Consortium APAC)

L’intensification de la destruction de l’environnement et des violations des droits des Peuples Autochtones et des communautés locales a amené divers personnes, organisations et réseaux à se mobiliser pour défendre la planète et leurs droits. Ces personnes et ces groupes peuvent se considérer comme des défenseurs des droits à la terre, des droits Peuples Autochtones, des droits humains ou environnementaux (« EHRDs » en anglais) ou comme des militants pour le climat. Dans le cadre de leur travail, des défenseurs et des militants ont été confrontés à des menaces de la part de différents acteurs, notamment des gouvernements, des entreprises et des groupes paramilitaires qui portent atteinte à la planète et à tous ceux qui en dépendent.

Selon Global Witness, 2020 a été l’année la plus meurtrière à ce jour pour les défenseurs des droits humains et environnementaux et les militants pour le climat, avec 227 personnes tuées dans le cadre de leur travail. Une analyse de l’ONG Frontline Defenders a montré que 59 % des défenseurs tués en 2021 luttaient pour les droits à la terre, les droits environnementaux et des Peuples Autochtones.

En Afrique spécifiquement, un rapport de 2021 sur le Fonds d’urgence pour les défenseurs africains a révélé que la majorité des défenseurs de l’environnement qui ont été soutenus par le Fonds ont reçu de multiples menaces, y compris des menaces de mort, des menaces d’arrestation et/ou des menaces d’attaque. Le rapport a également établi que l’expulsion est la deuxième menace la plus importante à laquelle sont confrontés les demandeurs. Parmi les autres risques courants documentés à travers le monde figurent les attaques physiques, les poursuites stratégiques contre la mobilisation publique (« SLAPP » en anglais), le harcèlement judiciaire, la violence émotionnelle et sexuelle et même la mort.

Nombre et type de menaces auxquelles sont confrontées les personnes qui ont demandé un soutien au Fonds d’urgence pour les défenseurs africains entre 2020 et 2021, selon le nouveau rapport sur le Fonds. Image : Natural Justice

Des rapports récents publiés par l’Alliance pour les défenseurs des droits fonciers, des Peuples Autochtones et de l’environnement (ALLIED, dont le Consortium APAC et Natural Justice sont membres) et le groupe de réflexion Universal Rights Group, avec le soutien de l’ONG Freedom House et son Fonds de survie pour les organisations de la société civile en difficulté, se concentrent sur les défis et les besoins spécifiques auxquels sont confrontés les défenseurs des droits humains et environnementaux et les militants pour le climat. Les deux rapports, Comprendre et répondre aux besoins de protection des activistes et des mouvements climatiques et Soutenir les défenseurs des droits humains en matière d’environnement, présentent les défis auxquels sont confrontés les défenseurs et partagent des recommandations pratiques pour les bailleurs et les organisations afin de mieux soutenir les défenseurs des droits humains et environnementaux et les militants pour le climat.

Ces rapports indiquent les observations-clés suivantes :

  • Il existe d’importants chevauchements entre le travail effectué par les défenseurs des droits humains et environnementaux et celui des militants pour le climat, et les questions sur lesquelles ils travaillent sont interconnectées. Par exemple, ceux qui travaillent sur les droits environnementaux et les droits humains défendent également le climat ; de même, la protection de l’environnement est ancrée dans le travail de nombreux militants pour le climat. De nombreux défenseurs des droits humains et environnementaux et militants pour le climat plaident également pour la réalisation de leurs droits humains à la vie, à la santé, à l’alimentation, à l’eau, et bien d’autres encore.
  • L’intersectionnalité rend certains défenseurs et militants plus vulnérables aux risques et constitue un obstacle supplémentaire à la recherche de soutien. Ces risques augmentent particulièrement pour les femmes et les Peuples Autochtones.
  • De nombreux défenseurs des droits humains et environnementaux et militants pour le climat sont confrontés à des menaces à l’encontre de leur vie, leur intégrité, leur participation et de nombreux autres droits fondamentaux, notamment parce qu’ils s’opposent à de puissants intérêts politiques et économiques.
  • Les défenseurs des droits humains et environnementaux et les militants pour le climat travaillent collectivement plus qu’individuellement. Ils travaillent également en tant que communautés, mouvements et réseaux pour exiger des droits collectifs qui nous concernent tous.
Des manifestants lors d’une marche pour le climat appelant à « changer le système, pas le climat ». Photo : C. Yakimov

Parmi les stratégies nécessaires pour soutenir efficacement le travail des défenseurs des droits humains et environnementaux et des militants pour le climat, citons les suivantes :

  1. Sensibiliser sur le rôle des militants pour le climat en tant que défenseurs des droits humains et environnementaux, et sur le rôle des défenseurs des droits humains et environnementaux en général.
  2. Mettre davantage l’accent sur la prévention des attaques par le biais de stratégies visant à garantir un espace civique ouvert.
  3. Reconnaitre que les défenseurs des droits humains et environnementaux doivent être les acteurs de leur propre protection. La plupart des défenseurs des droits humains et environnementaux et des militants pour le climat sont conscients des obstacles concrets et des menaces auxquels ils sont confrontés, de la manière dont ils doivent être traités et des types de soutien dont ils ont besoin pour contrer ces menaces. Faire de cette reconnaissance la base de stratégies de soutien efficaces.
  4. Soutenir les défenseurs des droits humains et environnementaux et les militants pour le climat pour renforcer leur résilience et leur capacité à identifier et à traiter les risques qui les affectent. Il s’agit notamment d’intégrer et de renforcer la protection collective, d’accroître l’accès à l’information, de renforcer la protection numérique des défenseurs, de s’attaquer aux « coûts cachés » de la défense d’un environnement et d’un climat sains, d’offrir une assistance psychologique, de fournir des conseils et des formations juridiques et de proposer un financement flexible pour soutenir les défenseurs de l’environnement et du climat.
  5. Adopter une approche d’intersectionnalité et de genre pour renforcer le soutien spécifique et la reconnaissance des femmes défenseures.
  6. Adopter des approches flexibles pour répondre rapidement aux situations d’urgence.
  7. Soutenir les défenseurs des droits humains et environnementaux dans la revendication et la sécurisation de leurs droits, notamment à la justice, la réparation et la non-répétition, en les formant et en leur donnant les moyens d’agir, ainsi qu’à leurs communautés, et en renforçant le soutien juridique.

Les rapports recommandent un certain nombre d’actions à envisager par les bailleurs et les organisations afin d’accroître le soutien aux défenseurs et aux activistes, notamment pour :

  • Accroître la sensibilisation, partager les informations et améliorer les communications afin de faciliter l’identification et l’accès aux sources potentielles de soutien.
  • Rendre accessible le soutien aux défenseurs des droits humains et environnementaux qui en ont le plus besoin en simplifiant les procédures de demande et en expliquant le soutien offert en termes simples, dans les langues locales et dans des formats adaptés au contexte.
  • Créer et renforcer les réseaux entre les défenseurs des droits humains et environnementaux et leurs communautés et organisations.
  • Augmenter la capacité des fonds d’urgence et autres fonds existants pour mieux soutenir les militants de l’environnement et du climat.

« L’étape suivante consiste, pour les fonds et les organisations de défense des droits humains, de protection de l’environnement, de sécurité et d’activisme pour le climat, à travailler ensemble de manière coordonnée afin d’accroître la protection des défenseurs de l’environnement et du climat. Cela ne nécessitera peut-être pas de créer de nouveaux fonds et structures, mais plutôt d’accroître la capacité de ceux qui existent déjà et de concevoir des mécanismes efficaces pour leur coordination et leur collaboration. »

Extrait de « Renforcer le soutien aux défenseurs de l’environnement et du climat : de nouveaux rapports présentent des recommandations aux donateurs et aux organisations de la société civile », une synthèse sur les deux rapports publiés par ALLIED et Universal Rights Group.

EN SAVOIR PLUS 

Note de la traductrice : certains documents, notamment les rapports, référencés dans le texte par des hyperliens ne sont pas disponibles en français.

Traduction : Patricia Iacob et Rachel Babin.