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Le moment est venu de protéger les droits de celles et ceux qui défendent les territoires de vie

Déclaration de solidarité à l’occasion de la Journée internationale des défenseurs des droits humains et de la Journée internationale des droits humains 2021

First published on 12/09/2021, and last updated on 06/13/2023

À l’occasion de la Journée internationale des défenseurs des droits humains (9 décembre) et de la Journée internationale des droits humains (10 décembre), le Consortium APAC est solidaire de tous les Peuples Autochtones et de toutes les communautés locales ainsi que leurs alliés qui se consacrent à la défense de leurs terres, de leurs eaux et de leurs territoires de vie collectifs.

La commémoration de cette année intervient alors que se poursuit la pandémie de COVID-19, qui a exposé de nombreux défenseurs et de nombreuses défenseuses à des attaques et à des violations de leurs droits et de ceux de leurs communautés. Dans son dernier rapport annuel sur les meurtres de défenseurs et de défenseuses de l’environnement et des droits humains, Global Witness a recensé 227 personnes tuées par des entreprises et des gouvernements. Ces meurtres sont associés, entre autres, à des violences sexuelles, des menaces sur les familles, et des actions de surveillance et de criminalisation. Cependant, on ne sait pas exactement combien de défenseurs et de défenseuses sont intimidés, blessés et tués chaque année, car de nombreux cas ne sont pas signalés.

Les Peuples Autochtones et les communautés locales défendent leurs territoires de vie pour de nombreuses raisons, dont le patrimoine culturel, les liens ancestraux et leur identité même. Leur sens profond de responsabilité envers la Terre Mère et leur quête d’autodétermination durable, qui profite à l’ensemble de l’humanité, ont souvent été jugés « anti-développement » par des entreprises et des gouvernements qui privilégient avant tout les profits à court terme. Les attaques brutales contre les leaders et les communautés qui affrontent et résistent en première ligne aux activités susceptibles de nuire à leur territoire de vie ont conduit à des pertes de vies, à des expulsions forcées et, plus largement, à un génocide culturel par assimilation forcée.

Le Consortium APAC exprime sa solidarité à toutes les personnes qui, en dépit de tous les obstacles et avec une grande résilience, continuent à lutter pour les droits des Peuples Autochtones et des communautés locales et pour l’avenir de notre planète. Nous nous souvenons solennellement de ceux et celles qui ont perdu la vie et des êtres chers aux mains d’agresseurs brutaux alors qu’ils défendaient leurs communautés, leurs territoires et la planète, et nous nous tenons fermement à leurs côtés. C’est un prix trop élevé à payer et il ne peut être ignoré, toléré ou oublié.


« Il peut y avoir des moments où nous sommes impuissants face à l’injustice, mais nous n’abandonnons ni ne reculons jamais. Nous continuerons à aller de l’avant et nous ferons ce que nous avons à faire. C’est la vie. Soyez forts et continuez à avancer, puis soutenez-vous les uns les autres. »

— Esther Wah (leader Autochtone et Membre d’Honneur du Consortium APAC)

Bien que les Peuples Autochtones et les communautés locales jouent un rôle prépondérant dans la protection et le maintien de la biodiversité et de la nature, leurs droits ont été violés au nom de la conservation par des approches descendantes et exclusives, également appelées « conservation forteresse ». Au Kenya, les projets de conservation de la forêt d’Embobut ont conduit à plusieurs expulsions des Peuples Autochtones Sengwer des collines de Cherangany. Les défenseurs et défenseuses de cette communauté ont été pris pour cible et attaqués, et une personne a même été tuée.

D’innombrables militants et militantes et communautés du monde entier ont dû mettre leur vie en danger pour protéger leurs terres et leurs territoires de vie. Cependant, il y a des signes d’espoir et de changement. Sous le leadership de Nemonte Nenquimo, les Autochtones Waorani ont intenté un procès au gouvernement équatorien, ce qui a abouti à un jugement historique qui protège plus de 20 000 hectares du territoire Waorani et de la forêt amazonienne de l’exploration et de l’extraction pétrolières. De l’Inde au Nigeria en passant par l’Europe du Nord, les communautés résistent non seulement aux graves menaces de l’exploitation minière et forestière et de l’énergie dite « verte », mais elles se dressent également contre les injustices systémiques et la fausse poursuite d’une croissance économique continue.

Le soutien international s’accroît également, quoique dans les limites du système multilatéral des États-nations. Dans sa récente déclaration à la COP 26 de la Convention des Nations Unies sur les changements climatiques, la Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a appelé les entreprises et les gouvernements à respecter leurs obligations en matière de droits humains dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques. Dans le cadre des négociations de la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique, de plus en plus de voix s’élèvent pour que les droits humains soient placés au centre du nouveau cadre mondial de la biodiversité, y compris dans le contexte des aires protégées et conservées. En octobre 2021, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a reconnu pour la première fois que l’accès à un environnement propre, sain et durable est un droit humain; cette reconnaissance est le résultat d’un effort collectif auquel plusieurs Membres et Membres d’Honneur du Consortium APAC ont contribué pendant de nombreuses années.

Malgré les nombreux défis et les violations continues des droits humains par des intérêts industriels et du secteur de la conservation, il y a une indéniable vague de fond soutenue par les Peuples Autochtones et les communautés locales qui défendent leurs territoires de vie ainsi qu’un entrelacement de mouvements et de luttes, créant un puissant tissu de résistance, de solidarité et de changement structurel.

Traduction : Marie-Line Sarrazin et Gaëlle Le Gauyer.